Barème Macron : où en est-on ?

Par Arnaud Teissier, avocat spécialisé en droit social chez Capstan

L’une des mesures emblématiques des ordonnances Macron (septembre 2017) a été de consacrer un barème d’indemnisation en cas de contentieux prud’homal. En fonction de la taille de l’entreprise et de l’ancienneté du salarié, ont été fixés des minima et des maximas. Le juge définit, dans ces limites, le montant de dommages et intérêts que va percevoir le salarié dont le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse.

La démarche politique est affichée : pour favoriser l’emploi, il faut offrir davantage de sécurité et de lisibilité juridique aux entreprises. La dose d’aléa qui existait en cas de contentieux a été jugée peu compatible avec les contraintes de gestion qui pèsent sur les chefs d’entreprise. Celle-ci impose en effet un minimum de prévisibilité. Un trop fort aléa en cas de licenciement (sur les conséquences financières de ce licenciement) est un frein puissant à l’acte d’embauche par les chefs d’entreprise.

Le barème Macron propose une solution qui annonce respecter les équilibres : offrir aux entreprises plus de lisibilité et de prévisibilité sur les « règles du jeu » ; sans pour autant compromettre le droit à indemnisation du salarié dont le licenciement serait jugé abusif. Le barème fixe un cadre d’indemnisation connu et mieux maîtrisé.

Un trop fort aléa en cas de licenciement est un frein puissant à l’acte d’embauche par les chefs d’entreprise

Pour autant, cette mesure a été critiquée par un certain nombre de représentants de salariés, selon lesquels elle consacrerait une atteinte au droit à une indemnisation juste. Invoquant des textes internationaux, cette critique a été portée devant de nombreux conseils de prud’hommes, puis en appel. Certaines décisions ont rejeté l’application d’un barème, considérant que la loi était contraire aux textes internationaux. En particulier à la convention 158 de l’OIT et à la charte sociale européenne, lesquelles prévoient que les juges nationaux doivent pouvoir ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre réparation appropriée.

Dans un avis rendu le 17 juillet 2019, la Cour de cassation a tranché la question ; jugeant que le barème était conforme et devait être appliqué. La plupart des juridictions appliquent aujourd’hui le barème Macron, ses minima et ses maxima (CA Paris 30 octobre 2019) … même si quelques cours d’appel tentent encore de résister (par ex., CA Reims 25 septembre 2019).

la Cour de cassation a jugé que le barème était conforme et devait être appliqué

Toutefois, même si le barème s’impose, il ne faut pas oublier qu’il ne couvre pas tous les types de demande, et notamment celles au titre du harcèlement ou les heures supplémentaires… Une stratégie de contournement du barème consiste donc à multiplier les demandes annexes devant le conseil de prud’hommes.

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